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Accord commercial avec le Mercosur « C’est non ! »

La première fronde du quinquennat concernera-t-elle les enjeux agricoles ? Alors que le gouvernement avance sur des œufs concernant l’accord conclu entre l’Union européenne et le Mercosur, Nicolas Turquois (Modem), agriculteur et député de la Vienne, a clairement tranché.

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Alors que le gouvernement temporise, vous avez adopté une position très claire concernant le traité commercial avec le Mercosur. Pourquoi ?

Il y a un grave défaut conceptuel. Un projet de cette importance, porté par une Commission européenne qui part une semaine plus tard, c’est un non-sens. Donc pour moi, c’est non ! Par ailleurs, le document diffusé par la Commission ne permet aucune visibilité sur les détails de cet accord. Je peux comprendre qu’il y ait un intérêt pour l’Europe à être présent en Amérique du Sud, mais il ne faut pas envoyer de mauvais signaux.

L’accord est-il si mauvais pour les producteurs français ?

Des doutes existent sur l’efficacité des services brésiliens de contrôle. Or on ne peut pas demander des efforts aux agriculteurs européens, et importer de la viande d’animaux nourris avec des aliments contenant des OGM ou du glyphosate. Accepter en Europe des produits qui ne partagent pas notre approche est un mauvais signal pour les exploitants.

Si vous refusez le Mercosur, pourquoi êtes-vous favorable au Ceta ?

Nous avons beaucoup plus de critères sociaux et environnementaux en commun avec le Canada qu’avec le Brésil. Avec le Ceta, [l’accord signé avec le Canada, NDLR], pour faire simple, nous échangeons des volumes de viande canadienne contre une reconnaissance des IGP françaises de fromages et un certain volume de ces fromages. Et à ce jour, les exploitants canadiens de viande qui souhaiteraient exporter chez nous doivent produire sans hormones. Une condition que peu d’éleveurs peuvent remplir à cause des difficultés climatiques de leur pays.

Avez-vous également été au Canada, comme d’autres parlementaires ?

J’y suis allé au printemps, à l’invitation de l’ambassade du Canada en France, avec deux autres députés. Nous avons rencontré là-bas des syndicats agricoles, des services de contrôle, et un éleveur dit de « filière européenne ». Avec 180 mères sur 700 hectares, le chargement était très faible, les vaches étaient quasiment toute l’année à l’herbe, et les veaux étaient engraissés à partir de 14 mois en feedlots. Mais la motivation première de cet exploitant, au-delà de l’exportation, était de travailler sans hormones.

Que répondez-vous à ceux qui s’inquiètent de l’arrivée de l’aloyau canadien sur le marché français ?

Effectivement, si on les cible sur les morceaux nobles, les importations canadiennes pourraient déstabiliser le marché. Dire que le risque n’existe pas sur ce sujet serait faux, mais il me paraît peu probable. Le made in Canada n’est pas très vendeur pour la commercialisation au détail. Les collectivités, avec les dispositions d’EGAlim, me semblent par ailleurs peu susceptibles de proposer du bœuf canadien.

Comment conciliez-vous votre activité de député et la gestion de votre exploitation ?

Je ne suis malheureusement pas monté sur mon tracteur depuis longtemps, mais j’ai trois salariés qui m’aident à gérer mes 190 hectares, dont 130 en production de semences.

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